MOHAMED BOUGRINE, Militant des droits de l’homme EPISODE 3/5 :
Il aura connu la prison sous le règne de trois rois pour ses idées politiques. Du haut de ses73 ans, Mohamed Bougrine reste lucide, le verbe tranché. Ses convictions et son idéalisme de gauche, n’ont pas changé d’un poil.
إهانة المقدساتالنشأة
Le soir échos - Le DIVAN
4/30/2008


« Mohamed El Yazghi est la seule personnalité valable à l’USFP»
Il est exagéré de considérer Amaoui comme une figure de l’USFP. C’est juste un super populiste qui dit ce qu’il ne fait pas et qui fait ce qu’il ne dira jamais.
Il aura connu la prison sous le règne de trois rois pour ses idées politiques. Du haut de ses73 ans, Mohamed Bougrine reste lucide, le verbe tranché. Ses convictions et son idéalisme de gauche, n’ont pas changé d’un poil.
Pendant les années 1980, vous avez de nouveau été arrêté, et plutôt trois fois qu’une. Le plus étonnant, c’est qu’en 1983, celui qui était derrière votre arrestation n’était pas le makhzen, mais l’USFP. Comment cela est-il arrivé ?
L’USFP de l’époque, et dont je faisais toujours partie, n’était déjà plus celui des années 1970. Ses instances dirigeantes étaient sujettes à contestation par bon nombre d’entre nous, y compris moi-même. D’où le mouvement de résistance que nous avons mené dans les locaux du parti à Fqih Ben Saleh et Béni Mellal. Ce qui m’a valu dix-huit mois de prison. En 1983, les mêmes instances ont commis l’irréparable en donnant leur accord pour la participation aux élections législatives dans un Maroc de Hassan II où rien n’allait plus et où la répression était à son plus fort. Et nous étions nombreux à dire non. C’était notamment lors d’une réunion du comité central du parti à Rabat, un certain 8 mai de la même année. A nos protestations, Abdelouahed Radi a répondu en faisant appel aux forces de l’ordre qui nous ont fait sortir, tabassant sur leur chemin plusieurs de nos camarades, dont Abderrahmane Benamer et Barakate El Yazid. Cette protestation, qui s’est transformée en accusation de « manifestation armée », m’a valu encore trois ans de prison.
Qu’êtes-vous devenu après ? Où avez-vous disparu jusqu’à votre dernière arrestation ?
A ma sortie de prison, j’ai rejoint mes camarades et ensemble nous nous sommes activés au sien de l’Union socialiste de la commission administrative, devenu par la suite le PADS (parti d’avant-garde démocratique et socialiste) dont j’étais l’un des fondateurs. Il faut dire qu’à aucun moment, je n’ai cherché à être sous les feux de la rampe, à briguer un poste de responsabilité. J’ai toujours été de ceux qui préféraient agir dans l’ombre.
Avec le recul que pensez-vous de l’USFP d’aujourd’hui ?
Ce que je pense est valable non seulement pour l’USFP mais aussi pour les neufs principaux partis de ce pays. Je dis bien neuf puisque tout le reste a été créé par l’administration et donc n’a aucune espèce de représentativité à mes yeux. Les dirigeants de ceux qui auraient pu devenir de véritables acteurs de la démocratie au Maroc se sont tellement éloignés de leurs bases qu’ils ont été pris dans le piège de la participation, qu’ils sont devenus comme orphelins. Ceci, au même titre que leurs bases, d’ailleurs, qui se cherchent encore. Ce constat est valable même pour le PADS. A trop vouloir prouver sa bonne foi, ce parti, comme bien d’autres, a commis l’erreur de faire le jeu du makhzen. Or, aucune bonne nouvelle ne justifiait cette participation. Comme Abderrahmane El Youssoufi, ils ont cru que un plus un égalait à deux. Mais en politique, les règles sont tout sauf mathématiques. Ce qu’ils ont eu au final, c’est un grand zéro. Je peux comprendre que la participation était une manière de pousser le régime dans ses derniers retranchements, d’agir et de réformer la situation de l’intérieur et dans le cadre de la légalité. Mais je reste convaincu que le jeu n’en valait pas la chandelle.
Certaines personnalités de l’USFP d’antan, que vous avez connues de très près, continuent cependant d’être présentes sur la scène. Qu’en pensez-vous ?
Je pense que la seule personnalité valable de l’USFP d’aujourd’hui est Mohamed El Yazghi. Pour moi, c’est un bourgeois militant qui est resté fidèle à ses convictions et qui veut vraiment participer à l’édification d’un Maroc démocratique. Cela explique le véritable état de siège dont il fait l’objet actuellement. Je dis cela bien que nous ayons eu de nombreuses divergences et différances de points de vue. Tout le reste des autres responsables itthadis appartient au makhzen. C’est eux qui ont traîné l’USFP dans la boue de la participation, attirés qu’ils étaient par les sirènes du pouvoir. Ils doivent maintenant être en train d’admirer leur œuvre.
Une autre « figure » de ce parti que vous avez côtoyée, à savoir Noubir El Amaoui, a également brillé par le retrait de ses conseillers de la deuxième chambre…
Dire que c’est une figure serait trop exagéré. Pour moi, et je n’ai pas envie de m’étaler dessus, Amaoui n’est ni plus ni moins qu’un super populiste qui dit ce qu’il ne fait pas et qui fait ce qu’il ne dira jamais.
PROPOS RECUEILLIS PAR
TARIK QATTAB